Date de publication :
29 septembre 2025
L'association France Ekbom est une structure qui œuvre dans l'intérêt des patients concernés par la maladie de Willis Ekbom. Une maladie neurologique qui se manifeste par ses sensations désagréables, voire douloureuses, dans les membres, amenant à un impérieux besoin de les bouger, essentiellement durant la nuit et au repos.
Décharges électriques dans les jambes, brulures sous les pieds, nuits hachées par des réveils en sursaut, impossibilité de rester assis trop long temps... Pour les patients atteints du syndrome des jambes sans repos - aussi appelé maladie de Willis Ekbom, chaque jour représente un défi invisible. Et Robert Parisot, président de l'Association France Ekbom (AFE) depuis 2016, en sait quelque chose.« Pendant longtemps, personne ne savait ce que j'avais, explique-t-il. C'est en regardant la té1évision que j'ai entendu parler de la maladie et de l'association.» Il intègre l'AFE en 2009 en tant que trésorier, avant d'en prendre la présidence sept ans plus tard.
Créée en novembre 2001 sous le nom l'Association française des personnes affectées par le syndrome des jambes sans repos, l'AFE est aujourd'hui la seule en Europe à financer la recherche sur cette maladie. Dès sa conception, et face à une forte demande émanant de personnes en souffrance, souvent perdues dans un parcours de soins peu encadré et confrontées ·à un manque de compréhension - que ce soit du côté médical, social ou familial -, l'association connaît une croissance rapide du nombre de ses membres.
Elle s'appuie alors sur la création d'un conseil scientifique pour amorcer une prise de conscience au sein du corps médical à propos d'une maladie encore largement méconnue. Son objectif : rassembler, informer et faire entendre la voix des 5 millions de patients en France. Des patients dont le quotidien est lourd : « Certains peuvent rester couchés jusqu'à cinq ou six heures sans symptômes, mais pour d'autres, c'est beaucoup moins, affirme Robert Parisot. Pour ma part, j'ai eu des nuits où je m'endormais vers 23 h... et à 1 h du matin j'étais debout. C'est très différent d'une nuità l'autre, je peux très bien dormir comme ne pas dormir du tout.»
Et ce n'est pas la seule activité compliquée. Travailler peut se révéler être un véritable défi, tout comme la conduite automobile. « Quand je suis longtemps sur la route, ça peut se déclencher sans qu'on sache pourquoi», complète-t-il. Quant aux symptômes, ils« sont propres à chacun». Et si ce n'est pas toujours douloureux, Robert Parisot a, par exemple, « les jambes qui bougent ou alors ça peut être des sensations de brûlures ou de picotements sous les pieds », raconte-t-il. D'autres symptômes existent : fourmillements dans les jambes, contractures, secousses, torsion ou encore dé charges électriques. Ce syndrome concernerait 8,5 % de la population, estime l'Association France Ekbom, soit plus de 5800000 Français.
66% DE FEMMES
Pour l'heure, on ne sait pas grand-chose de cette maladie. Deux causes sont à l'origine : une cause primaire, idiopathique, souvent à caractère familial, et une cause secondaire par diverses autres pathologies (carences ferriques et ferritinémie basse, insuffisance rénale, grossesse, polyarthrite) ou des médicaments (antidépresseurs, antihistaminiques). « fl ne faut pas oublier, précise Robert Parisot, que la maladie peut être déclenchée aussi par un choc émotionnel. Je pense que dans ce cas-là, la maladie est latente et le choc émotionnel ne fait que la déclencher». De plus, cette pathologie« touche majoritairement les femmes», ajoute-t-il, avec« près de 66% de patientes». Une différence qui s'explique notamment par des variations de fer dans l'organisme, comme lors de la grossesse.« Chez certaines, les symptômes disparaissent après l'accouchement mais pas toujours», précise Robert Parisot, ancien directeur d'un bureau d'études de recherche en aviation et en automobile et aujourd'hui à la retraite. Mais la prise en charge reste complexe : errance médicale, traitements non remboursés, absence de formation des médecins généralistes.
La majorité des patients mettent plusieurs années à poser un nom sur leurs symptômes. Selon les cas, pour reconnaître la pathologie, un enregistrement vidéo de polysomnographie est réalisé dans les centres spécialisés dans la prise en charge des pathologies du sommeil. Cet examen permet de confirmer et d'objectiver, entre autres, l'hype ractivité motrice nocturne, les mouvements périodiques des membres et les perturbations du sommeil. L'AFE aide à orienter les malades vers des neurologues formés, grâce à un réseau construit par les adhérents.
Agir pour la recherche
Avec 2400 adhérents, aucun salarié mais de nombreux correspondants bénévoles en région, l'Association France Ekbom organise chaque année des réunions d'information pour le public et les patients auxquelles sont« tenus de pa ticiper au moins une fois par an les bénévoles, pour parler de la maladie».
« La majorité de nos bénévoles ont mis plus de vingt ans pour trouver ce qu'ils avaient" relate le président.
"Les médecins généralistes ne connaissent pas cette maladie, et ont dit aux patients que c'est bénin, que c'est dans leur tête... J'aimerais dire aux professionnels de santé que ce n'est pas une maladie bénigne, on n'affabule pas. Des gens perdent leur métier ou leur onjoint à cause de cette maladie. C’est une réalité"
Côté recherche, plusieurs projets innovants sont en cours : stimulation du nerf vague, pour palier le déficit de dopamine entre le cerveau et la moelle épinière ; étude sur le microbiote avec des volontaires sevrés de traitement, analyses protéomiques, pour mieux comprendre les mécanismes de la maladie... De plus, en collaboration avec la Société française de recherche et médecine du sommeil (SFRMS), l'association prépare également un appel à projets destiné à de jeunes chercheurs, pour dynamiser l'avancée des connaissances.
L'association est aujourd'hui reconnue par le ministère de la Santé et fait partie de plusieurs réseaux européens et internationaux, comme la SFRMS ou l'European Restleggs Study Group's. L'enjeu reste le même : faire connaître, lutter contre les idées reçues et soutenir ceux qui vivent avec cette pathologie souvent minimisée.
Pour ce qui est des traitements, il peut s'agir d'agonistes au dopaminergiques, ou d'antiépileptiques par exemple. Seul hic : ils ne sont pas remboursés par !'Assurance maladie, qui « considère ces traitements comme des médicaments de confort », déplore le président de l'AFE.
De plus, les patients ont quelques idées reçues vis-à-vis de ces traitements : « Ils craignent de déclencher la maladie de Parkinson. Mais ce sont deux maladies différentes. Dans la maladie de Willis-Ekbom, il n’y a pas dégénérescence du cerveau » poursuit Robert Parisot.. "Il y a aussi les efffets secondaires des médicaments et certains supportent la maladie le plus longtemps possible sans se soigner, craignant les effets secondaires alors que l'on sait que l'on ne va pas forcément les ssubir. Il faut juste en être informé pour être vigilant. Par exemple, il y a des risques d'addictions : addications aux jeux, achats compulsifs, ouvertures répétitives du frigo la nuit, libido augmentée...cela peut aussi causer des nausées" poursuit Robert Parisot.
"Il ne faut pas oublier cependant que la maladie non soignée provoque elle-même des effets très négatifs".